Le procès de
Georges Tron et de Brigitte Gruel pour viols en réunion et
agressions sexuelles devant la cour d'assises de Bobigny sera t-il
reporté ? C'est en tous cas la demande faite ce matin par les
avocats des deux accusés, qui ont soulevé un incident d'audience.
Antoine Vey, avocat de l'ancien secrétaire d’État à la fonction
publique, a dénoncé au début de ce quatrième jour d'audience « la
diffusion d'un reportage hier soir et les attaques inacceptables
contre le président ». France 2 a diffusé hier soir un
reportage d'Envoyé spécial consacré à l'affaire, auquel la
défense a refusé de participer. Pour l'avocat, « la diffusion
de ce reportage nous place dans une situation impossible. Le climat
n'est plus serein ».
Des « attaques
personnelles inacceptables » contre un président d'assises
selon la défense. Me Franck Natali, avocat de Brigitte Gruel, se
fait le plus vindicatif : « J'ai quarante ans de barreau,
je n'ai jamais vu ça. Une campagne pareille. Les mots que je
prononce là sont déjà sur twitter », puis prenant à partie
une femme avec son téléphone : « Là, vous twittez !
Vous devriez être plus discrète ! ». Depuis de nombreuses
années, twitter est autorisé pour les journalistes en salle
d'audience, un outil qui permet à la presse de rendre compte en
temps réel des procès. Comme souvent sur les réseaux sociaux,
l'opinion publique se saisit parfois de ces tweets pour dénoncer
l'attitude de tel avocat ou de tel président. Les journalistes ne se
privent pas non plus dans leurs chroniques judiciaires de sabrer les
acteurs judiciaires, ils le font maintenant sur twitter comme ils le
faisaient avant dans les longs feuilletons que la presse quotidienne
leur réservait. Mais pour la défense, ces remises en causes du
président de la cour risquent d'influer sur la suite de l'audience,
ce dernier hésitera peut être désormais à poser certaines
questions aux plaignantes ou aux témoins. « Compte tenu des
circonstances » et « à grands regrets », les
avocats des deux accusés demandent donc le renvoi.
Pour les parties
civiles, Me Alexandre-M. Braun s'oppose « fermement » à
cette demande : « La vérité, c'est que M. Tron n'a pas
envie d'être jugé. Envoyé spécial est un prétexte. La défense a
la sentiment que ce procès est plus difficile que ce qu'elle
pensait. Ça suffit la naïveté, la justice est publique ! ».
Enfin, l'avocat
général, Frédéric Bernado, se lève. Pour parler face aux jurés,
il descend de son estrade et se place face à eux :
« La presse
s'introduit dans les cours d'assises ? C'est une tarte à la crème !
Ce débat est aussi vieux que les cours d'assises, André Gide le
racontait déjà. Les tweets c'est quoi ? Un compte rendu d'audience,
pas plus. C'est parfaitement autorisé. La défense ne se prive pas
de parler à la presse dehors. Mais tout ce qui est dehors, c'est du
brouhaha, de l'écran de fumée. Le procès se passe ici, dans cette
cour d'assises. Ce qui importe le plus, c'est la liberté
d'information. En quoi la presse vient-elle aujourd'hui porter
atteinte au procès équitable ? Il n'y a pas de risque de mon point
de vue, je m'oppose à cette demande de renvoi. »
« Surtout
pas d’indulgence », c’est le mot d’ordres, soufflé par
les journaux », écrivait André Gide en 1914 dans ses
Souvenirs de cour d'assises...
La cour s'est retirée pour statuer sur cette demande de renvoi et
rendra sa décision à 14 heures.
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