Il est l'incarnation de la génération
« bling-bling ». Celle que Nicolas Sarkozy a porté aux
nues et au pouvoir. Devant la XIe chambre du tribunal correctionnel
de Paris, Boris Boillon n'a rien perdu de sa superbe. Costume chic
sur un corps musclé - dont chacun se souvient pour l'avoir vu en
slip de bain lorsqu'il était ambassadeur en Tunisie -, il se défend
avec arrogance, coupe la parole et multiplie les injonctions. « Je
suis un grand sportif, j'aime sortir de ma zone de confort »,
lance t-il au président du tribunal, Peimane Ghaleh-Marzban, qui lui
demande pourquoi il a quitté la fonction publique pour se lancer
dans le privé. En réalité, l'ancien conseiller diplomatique de
Nicolas Sarkozy a fui le quai d'Orsay à l'arrivée de François
Hollande. Celui qui a fait sienne la devise d'Henri Bergson « Il
faut agir en homme de pensée et penser en homme d'action »
craignait de végéter dans un placard.
Le voici donc businessman en Irak.
Pourquoi ce pays ? interroge le président. « Ma valeur
ajoutée est d'aller dans les endroits difficiles, de mériter le
salaire de la peur ». Sous la signature de sa nouvelle société,
Boris Boillon mentionne « ancien ambassadeur ». « Vous
avez beaucoup de mal avec la notion de conflit d'intérêt »,
le tacle le procureur de la République, qui dit ne pas comprendre
son rôle « nébuleux » en Irak. « Le commerce est
une autre façon de servir mon pays, j'aidais les entreprises à
s'implanter, explique celui qui maîtrise parfaitement l'arabe. En
2012, l'Irak sortait de la guerre civile, il fallait du pain et des
jeux pour le peuple. » A Nassiriya, dans le Sud du pays, il dit
aider à la construction d'un stade olympique de 30 000 places en
mettant en relation maîtres d’œuvre et intermédiaires locaux.
Mais pour Boris Boillon, tout s'écroule
le 31 juillet 2013, sur le quai numéro 8 de la Gare du Nord, alors
qu'il est sur le point d'embarquer dans un train pour Bruxelles. Aux
douaniers qui lui demandent s'il doit déclarer des sommes
supérieures à 10 000 euros, il répond « non ». La
fouille de son sac révèle pourtant 350 000 euros et 40 000 dollars
en billets de banque. Ses revenus gagnés à Nassiriya assure Boris
Boillon devant le tribunal en mettant en cause les défaillances du
système bancaires irakien où tout est payé en liquide. « Si
c'était à refaire, je le referai, je ne vois vraiment pas comment
j'aurais pu faire autrement ». L'ancien ambassadeur rapatrie
clandestinement cet argent par avion en France avant de le cacher
dans un studio parisien et même dans un trou creusé près de sa
cave. « Je me suis fait une montagne de cet acte simple :
mettre cet argent qui me brûlait les mains dans une banque. J'étais
comme une poule autour d'un couteau. »
Des « regrets nombrilistes »
pour le procureur de la République qui a requis hier matin 18 mois
de prison avec sursis assortis d'une interdiction d'exercer toute
fonction publique et commerciale pendant cinq ans. A la barre, Boris
Boillon a expliqué avoir cessé toute activité en Irak en septembre
2014 après l'arrivée de Daech. « Tout mes projets ont été
stoppés, une perte gigantesque pour moi. » Il a réintégré
le quai d'Orsay, où il effectue des missions diplomatiques
ponctuelles. Sur les rives de l'Euphrate, le stade de Nassiriya est
lui toujours en friche. Le chantier a été définitivement arrêté
en 2015, alors que 70% du bâtiment avait été construit.
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