Elles ont un imperceptible mouvement
des épaules. Pour se tenir bien droite. Faire front, la tête haute.
Hier matin, en silence et l'air grave, huit femmes ayant dénoncé
des harcèlements et agressions sexuelles de la part de l'ancien député
Denis Baupin ont défilé devant la barre de la 17e chambre du
tribunal correctionnel de Paris. Elles y comparaissent jusque
vendredi pour diffamation, aux côtés de deux journalistes de
Mediapart et de France Inter.
De l'autre côté de la barre, Emmanuel
Pierrat, avocat de Denis Baupin, alterne la condescendance,
l'outrance et les insultes. A Antoine Comte : « Être
indigné quand on est avocat, je trouve ça toujours étonnant, je
préfère qu'on s'en tienne au droit. » Au tribunal : « Je
ne pense pas qu'il soit utile de faire venir M. Baupin, supporter les
avanies, les injures qu'il subit depuis trois ans. Il a déjà
répondu très longuement à la police. Nous avons prouvé que ce
qu'elles disaient étaient mensongers et faux ! ». Au passage,
l'avocat regrette qu'EELV soit « devenu un QG puritain »,
étrille l'« imagination qui fait des bulles » des deux
journalistes de France Inter et de Mediapart, et traite cette
dernière de « mormone en cheffe de cette tribu »...
Après une brève suspension
d'audience, la tribunal rejette la demande des avocats la défense.
Edwy Plenel est le premier entendu à la barre. « Cette affaire
est la première affaire #metoo avant que metoo n'existe, commence le
journaliste. Cela a permis que ces femmes qui n'avaient jamais parlé
se libèrent. L'enjeu, d'intérêt public, était
de briser l'omerta. Depuis, il y a eu une révolution mondiale avec
l'affaire Wenstein. » Le directeur de la publication de
Mediapart défend « le sérieux de l'enquête », qui a
« respecté le contradictoire », le tout dans un
« contexte déjà lourd » : « Je n'ai jamais
connu ça en quarante ans de journalisme, le 8 avril, un mois avant
notre article, je reçois une lettre de Me Pierrat me mettant en
demeure de ne pas le publier ». Des pressions qui
continuent après la publication de l'article, avec une demande de
suppression « contraire à tout droit de la presse ».
Avant de quitter l'audience pour rejoindre Mediapart où une
perquisition est en cours (lire ci-dessous), Edwy Plenel dénonce
l'absence « indigne » de Denis Baupin : « Il
n'a pas le droit de se dérober sauf à être, comme il le fut avec
ces femmes, un irresponsable. »
Le procès doit reprendre
cet après-midi avec la suite de l'audition des prévenus.
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