Le soir du 22 avril 2014, ils étaient trois policiers de garde au 36,
quai des Orfèvres, le siège de la police judiciaire parisienne. Deux à
l’entrée, un troisième au premier étage. Trois plantons qui ont vu
entrer Emily S. accompagnée de deux agents de la Brigade de recherche
et d’intervention (BRI), vers 0 h 40. La touriste canadienne leur
paraît « joyeuse », bien que « très éméchée » et le «regard vitreux».
Elle titube, rentre dans le portant de la porte, mais, note le premier,
« est montée de son plein gré ».
Suivent les échanges téléphoniques entre les policiers. Un agent à l’entrée à celui du premier étage : « Ils montent, tu vas entendre couiner. » Un peu plus tard, celui du premier étage à ceux de l’entrée :
Suivent les échanges téléphoniques entre les policiers. Un agent à l’entrée à celui du premier étage : « Ils montent, tu vas entendre couiner. » Un peu plus tard, celui du premier étage à ceux de l’entrée :
« – Je crois qu’elle est en train de se faire claquer, j’entends des petits bruits.
– Quels bruits ?
– Des ha ha (en mimant des cris de plaisir).
– Ah la salope... »
Changement de ton peu après 2 heures du matin, lorsque Emily S.
redescend, accompagnée des deux mêmes agents : « Elle pleure, là, elle
arrive, elle dit qu’elle s’est fait tripoter et violer. » Devant la cour
d’assises de Paris, le policier de faction à l’entrée du 36 décrit une
femme « prostrée », « choquée », « traumatisée », qui « pleure à chaudes
larmes ». Il demande alors des explications à l’un des deux agents de
la BRI, aujourd’hui sur le banc des accusés pour viol en réunion. Réponse (il ne
se souvient plus duquel) : « Elle est bourrée, c’est de la
merde, faut la dégager. » Le jeune policier tente tout de même de parler
à Emily S., « roulée en boule ». Elle lui dit « they rapped me » et
comme il lui demande de répéter en Français : « Ils ont voulu sexe avec
moi que je voulais pas. » Devant la « gravité des accusations », le
planton prévient sa hiérarchie. Puis s’adresse à la jeune femme : « Je
suis désolé de vous demander ça, mais est-ce qu’il y a eu
pénétration ? » « Oui et ils ont pris des photos. » « Après, beaucoup de monde est arrivé, les patrons et
tout, raconte le policier. Je me suis senti dépassé, je me suis mis sur
le côté. »
Dans la matinée, Nicolas R., l’un des deux accusés, a demandé à prendre la parole devant la cour : « Je n’arrive plus à
dormir, je ne mange plus, je sais que je suis innocent, déclare-t-il, la
voix forte et tremblante. On me fait passer pour un taré qui se fait
plaisir à taper une femme et à la violer. Je veux juste être entendu. »
Le président l’a assuré qu’il pourrait s’exprimer sur les faits ce vendredi,
soit après quasiment deux semaines d’audience.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire