Son nom est inconnu en France, mais dans les rues de Kigali, il ravive des souvenirs... Pascal Simbikangwa n’est pas « n’importe qui », estime Simon Foreman, avocat du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), qui le décrit comme « un tortionnaire réputé au Rwanda ». Ces accusations de tortures, aujourd’hui prescrites, n’ayant pu être retenues contre lui, Pascal Simbikangwa comparaît jusqu’au 14 mars devant la cour d’assises de Paris pour complicité de crimes contre l’humanité et complicité de génocide. Il est accusé d’avoir « contribué, en connaissance de cause, à la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires et autres actes inhumains, ainsi qu’au génocide ».
C’est presque par hasard que David Senyamuhara Safari, alias Pascal Simbikangwa, est arrêté à Mayotte en octobre 2008 par la police aux frontières pour trafic de faux papiers. Rapidement, l’enquête révèle qu’il fait l’objet d’un mandat d’arrêt international décerné par les autorités rwandaises pour « génocide, complicité de génocide, complot en vue de commettre le génocide, crimes contre l’humanité ». Il est mis sous écrou extraditionnel. La France refuse son extradition vers le Rwanda et le place en détention provisoire à Fresnes en avril 2009. Cet homme, âgé aujourd’hui de cinquante-quatre ans, est né dans le nord du Rwanda, dans la région de Gisenyi, celle de la famille de l’ancien président Juvénal Habyarimana. « Il fait partie de l’Akazu », assure Alain Gauthier, du CPCR, qui a déposé la première plainte contre lui en 2009. Ce terme, qui signifie « petite maison » en kinyarwandais, désigne le premier cercle du pouvoir, des Hutu extrémistes proches du président. Capitaine dans la garde présidentielle, il intègre le renseignement militaire en 1986 après un accident qui le laisse paraplégique, puis le renseignement intérieur.
Pendant le génocide, d’avril à juillet 1994, il est accusé d’avoir fourni armes, instructions et encouragements aux miliciens hutu Interahamwe qui tenaient les barrages dans Kigali où ils exécutaient les Tutsi – hommes, femmes et enfants – qui s’y présentaient. Décrit comme un « criminel de bureau » par les parties civiles, il était également actionnaire fondateur de la Radio des mille collines, qui multiplia les appels aux meurtres contre les Tutsi. Pascal Simbikangwa ne sera pas jugé pour le massacre du 8 avril 1994 à Kesho, pour lequel il a bénéficié d’un non-lieu, ce que regrettent les parties civiles. Pour les juges d’instruction français, la « fragilité » et le caractère « tardif » des témoignages « comportant des contradictions » créent un « réel doute » sur sa présence au bas de la colline ce jour-là. Pascal Simbikangwa nie les faits qui lui sont reprochés. « Il a hâte de pouvoir s’exprimer devant une cour d’assises », explique l’un de ses avocats, Fabrice Epstein. Il encourt la réclusion à perpétuité, assortie d’une peine de sûreté qui pourrait être portée jusqu’à vingt-deux ans.
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