C’est une première qui fait polémique : le tribunal correctionnel de Cayenne a condamné mardi Anne-Sophie Leclère, ancienne candidate frontiste aux municipales, à neuf mois de prison ferme, 50 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité pour « injures publiques à caractère racial » et « provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence raciale ». Pour ces délits, la commerçante de trente-trois ans risquait jusqu’à dix-huit mois d’emprisonnement et 67 500 euros d’amende. Dans l’émission Envoyé spécial, diffusée le 17 octobre 2013 sur France 2, Anne-Sophie Leclère avait assumé un photomontage publié sur sa page Facebook montrant, à gauche, un singe déguisé en petite fille, légendé « à 18 mois » et, à droite, une photo de la garde des Sceaux, Christiane Taubira, sous-titrée « Maintenant ». Face caméra, l’habitante de Rethel (Ardennes) déclarait : « C’est vraiment une sauvage. Je préfère la voir dans un arbre après les branches que dans le gouvernement. » Le Front national, qui l’avait exclue en décembre 2013, a tout de même écopé de 30 000 euros d’amende.
Les deux condamnés ont annoncé hier qu’ils interjetaient appel. Le FN dénonce un jugement « politique », dans lequel il voit « la main de Christiane Taubira ». Anne-Sophie Leclère, elle, se défend de tout racisme, expliquant avoir été « piégée » par une journaliste. « France 2 l’a poussée dans ses retranchements et elle a dit ce qu’elle ne pensait pas », nous a expliqué son avocat, Jacques Erb, hier au téléphone. Et d’ajouter, extrêmement sérieux : « Elle n’est pas raciste, j’ai même l’attestation d’un Noir qui va comparaître (en appel – NDLR). » L’intéressée ne se défend guère mieux. Interrogée sur BFM TV, elle a osé dire : « Alors que Christine (sic) Taubira veut vider les prisons, si on commence à y mettre toutes les personnes qui font un peu d’humour, les prisons vont bien se remplir… »
Les magistrats de Cayenne n’ont pas saisi la blague et ont donc appliqué la loi, allant même au-delà des réquisitions du parquet qui avait réclamé quatre mois de prison et 5 000 euros d’amende. La sévérité de la peine finale peut d’abord s’expliquer par l’absence d’Anne-Sophie Leclère à l’audience. Les magistrats punissent souvent plus durement les prévenus qui ne se présentent pas devant eux. L’ex-candidate FN explique qu’elle n’avait pas les moyens de se déplacer en Guyane. Elle aurait pu faire appel à un avocat commis d’office, mais Me Erb assure que la commerçante pensait être défendue par son ancien parti.
Pour Pierre Mairat, avocat du Mrap, cette sanction s’explique aussi par le « degré extrême de gravité des propos » : « Cette condamnation est en adéquation avec le grave trouble à l’ordre public occasionné lorsque vous condamnez toute une partie de l’humanité à l’animalité. » L’avocat espère que cette peine de prison ferme deviendra un « étalon » contre les « expressions racistes ». Car si cette sanction surprend, c’est bien parce qu’elle tranche avec la jurisprudence. Pierre Mairat en sait quelque chose : il a vainement tenté de poursuivre devant la Cour de justice de la République Manuel Valls et Claude Guéant, pour leurs propos sur les Roms et les Comoriens. Les plaintes n’avaient pas abouti. Seul l’ancien ministre Brice Hortefeux, qui avait jugé que les Arabes posaient « problème » quand ils étaient nombreux, a été condamné en première instance à… 750 euros d’amende. Puis relaxé en appel, le tribunal considérant que l’injure n’était pas publique.
Même satisfecit chez Alain Jakubowicz, président de la Licra, pour qui, cette décision a le mérite de rappeler qu’« on peut faire de la prison ferme pour racisme ». « Il faut, ajoute cet avocat, qu’on mette dans la tête des Français que l’expression du racisme et de l’antisémitisme constitue des délits à part entière et pas des sous-délits. »
Mais tout le monde ne se réjouit pas de cette lourde peine. Ainsi, le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de l’extrême droite, se dit, lui, « mal à l’aise » après cette décision : « J’aurais préféré davantage de condamnations pour propos racistes plutôt que cette décision, qui semble rattraper les faibles peines sur ces questions. Il ne faudrait pas que tout retombe sur une seule personne et que la disproportion soit trop forte avec les autres cas. »
Quoi qu’il en soit, l’affaire ne fait que commencer. Anne-Sophie Leclère est visée par deux autres procédures, initiées par le Cran et le parquet lui-même.
Les deux condamnés ont annoncé hier qu’ils interjetaient appel. Le FN dénonce un jugement « politique », dans lequel il voit « la main de Christiane Taubira ». Anne-Sophie Leclère, elle, se défend de tout racisme, expliquant avoir été « piégée » par une journaliste. « France 2 l’a poussée dans ses retranchements et elle a dit ce qu’elle ne pensait pas », nous a expliqué son avocat, Jacques Erb, hier au téléphone. Et d’ajouter, extrêmement sérieux : « Elle n’est pas raciste, j’ai même l’attestation d’un Noir qui va comparaître (en appel – NDLR). » L’intéressée ne se défend guère mieux. Interrogée sur BFM TV, elle a osé dire : « Alors que Christine (sic) Taubira veut vider les prisons, si on commence à y mettre toutes les personnes qui font un peu d’humour, les prisons vont bien se remplir… »
Les magistrats de Cayenne n’ont pas saisi la blague et ont donc appliqué la loi, allant même au-delà des réquisitions du parquet qui avait réclamé quatre mois de prison et 5 000 euros d’amende. La sévérité de la peine finale peut d’abord s’expliquer par l’absence d’Anne-Sophie Leclère à l’audience. Les magistrats punissent souvent plus durement les prévenus qui ne se présentent pas devant eux. L’ex-candidate FN explique qu’elle n’avait pas les moyens de se déplacer en Guyane. Elle aurait pu faire appel à un avocat commis d’office, mais Me Erb assure que la commerçante pensait être défendue par son ancien parti.
Pour Pierre Mairat, avocat du Mrap, cette sanction s’explique aussi par le « degré extrême de gravité des propos » : « Cette condamnation est en adéquation avec le grave trouble à l’ordre public occasionné lorsque vous condamnez toute une partie de l’humanité à l’animalité. » L’avocat espère que cette peine de prison ferme deviendra un « étalon » contre les « expressions racistes ». Car si cette sanction surprend, c’est bien parce qu’elle tranche avec la jurisprudence. Pierre Mairat en sait quelque chose : il a vainement tenté de poursuivre devant la Cour de justice de la République Manuel Valls et Claude Guéant, pour leurs propos sur les Roms et les Comoriens. Les plaintes n’avaient pas abouti. Seul l’ancien ministre Brice Hortefeux, qui avait jugé que les Arabes posaient « problème » quand ils étaient nombreux, a été condamné en première instance à… 750 euros d’amende. Puis relaxé en appel, le tribunal considérant que l’injure n’était pas publique.
Même satisfecit chez Alain Jakubowicz, président de la Licra, pour qui, cette décision a le mérite de rappeler qu’« on peut faire de la prison ferme pour racisme ». « Il faut, ajoute cet avocat, qu’on mette dans la tête des Français que l’expression du racisme et de l’antisémitisme constitue des délits à part entière et pas des sous-délits. »
Mais tout le monde ne se réjouit pas de cette lourde peine. Ainsi, le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de l’extrême droite, se dit, lui, « mal à l’aise » après cette décision : « J’aurais préféré davantage de condamnations pour propos racistes plutôt que cette décision, qui semble rattraper les faibles peines sur ces questions. Il ne faudrait pas que tout retombe sur une seule personne et que la disproportion soit trop forte avec les autres cas. »
Quoi qu’il en soit, l’affaire ne fait que commencer. Anne-Sophie Leclère est visée par deux autres procédures, initiées par le Cran et le parquet lui-même.
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