Annette Anil a de la suite dans les idées. A 67 ans, cette Fautaise reconnait elle-même qu’elle est plutôt du genre « têtue et tenace » : « mon père était gendarme, il m’a appris à avoir une certaine rigueur ». Cheveux blancs coupés courts, lunettes à montures rouges, elle est venue déposer un témoignage implacable cet après-midi au tribunal correctionnel des Sables d’Olonne (Vendée), où comparaissent depuis lundi cinq prévenus pour homicides involontaires après le passage meurtrier de la tempête Xynthia à la Faute-sur-mer en 2010.
Pendant des années, cette femme et son mari ont tenté d’obtenir des informations sur la digue censée les protéger des inondations puis d’alerter les populations sur son délabrement. Ils se sont heurtés à un « clan », qui refusait d’informer. Ceux-là même qui sont aujourd’hui assis sur le banc des accusés. « C’est un petit monde très fermé, qui fait ses petites affaires gentiment, décrit François Anil. Avec les conséquences que ça a eu… ».
Fille de Fautais (son père a même été brièvement maire en 1977), Annette Anil achète une maison en 1981 sur le boulevard du Lay, soit juste derrière la digue qui protège ces habitations contre la rivière Lay, sujette à de brusques débordements durant les grandes marées. En 2003, désormais à la retraite, le couple s’installe définitivement à la Faute. Deux ans plus tard, ils apprennent le classement de la digue comme intéressant la sécurité publique. « De larges zones occupées par des habitations sont soumises à un risque d’inondation », écrit l’arrêté préfectoral.
Inquiète pour sa sécurité et celle de ses voisins, Annette Anil va alors se lancer dans une véritable croisade pour obtenir des informations sur cette digue. L’endroit est géré par l’obscure Association syndicale des marais de la Faute, dite association des Chauveau, qui refuse de lui donner accès à ses archives. « Le président a systématiquement refusé que je consulte ces documents », raconte t-elle. Or à l’époque, le syndicat est présidé par Philippe Babin, fils de la première adjointe de Marratier, aujourd’hui sur le banc des prévenus aux côté de sa mère pour homicides involontaires et mise en danger d’autrui. On lui reproche entre autre de ne pas avoir organisé la surveillance de la digue le soir de la tempête Xynthia. Submergée par les flots dans la nuit du 27 au 28 février 2010, la digue Est a ensuite empêché l’eau de refluer, bloquant les habitants dans 2m30 d’eau. 29 sont morts noyés.
Face au refus de Philippe Babin, Annette Anil se tourne vers la préfecture qui la laisse accéder aux archives. Dans ces nombreux papiers – qu’elle met un mois à éplucher ! – elle découvre le nom de son mari : il est – sans jamais en avoir été informé assure t-il – syndic depuis dix ans ! Un « syndic fantôme » constate le président du tribunal. Annette Anil pose sa candidature pour intégrer l’association. « J’étais le vilain petit canard qui rentrait dans la forteresse ». Méconnu à la Faute-sur-mer, le syndicat est pourtant constitué de tous les propriétaires de la ville. Il est chargé de l’entretien des digues. Ordonnée par la préfecture, l’entrée au syndicat de Mme Anil n’est visiblement pas du goût du maire de la Faute, René Marratier, qui se fend d’une lettre à la sous-préfète, en juillet 2007, pour la tancer de cette décision. « Le syndicat a toujours été géré par des personnes qui sont nées ou habitent à la Faute depuis plusieurs dizaines d’années », écrit l’édile qui reproche à Annette Anil de n’habiter la ville que « depuis quelques années », de vouloir « grignoter le fruit de l’intérieur ». « Il a suffit à cette personne de formuler quelques jérémiades, conclue t-il, pour qu’elle soit élue ».
Sauf que Mme Anil a, entre temps, eu connaissance d’un diagnostique réalisé en 2006 sur la digue Est. « La digue était dégradée, très abimée à plusieurs endroits, explique-t-elle. Mais quand je disais en réunion du syndicat qu’il fallait le dire, on me répondait ‘Ouh la la, vous allez effrayer toute la population’. Ca m’a semblé aberrant que le syndicat ne réunisse pas les habitants pour les informer, il s’agissait de la sécurité de tout le monde, mais comme il ne faut pas faire peur aux gens, on ne dit rien. » Ce diagnostic relève des sections à risques, notamment les lotissements des Doris et des Voiliers, ceux où la majorité des victimes ont trouvé la mort le 28 février 2010.
Décidée à ne pas garder ce qu’elle sait pour elle, Annette Anil écrit plusieurs articles dans un journal local, L’Echo fautais, distribué dans toutes les boites aux lettres – y compris celles des élus. Apprenant aussi que des plaquettes ont été éditées sur les dangers de la digue, elle se rend à la direction départementale de l’équipement (DDE) en récupérer un carton, qu’elle distribuera ensuite à ses voisins. « Plusieurs personnes ont dit pendant l’instruction que ces plaquettes leurs avaient sauvé la vie », l’informe le président. Toujours très droite, elle lui répond : « Si ça a servi à ça, c’est extraordinaire ».
Pendant des années, cette femme et son mari ont tenté d’obtenir des informations sur la digue censée les protéger des inondations puis d’alerter les populations sur son délabrement. Ils se sont heurtés à un « clan », qui refusait d’informer. Ceux-là même qui sont aujourd’hui assis sur le banc des accusés. « C’est un petit monde très fermé, qui fait ses petites affaires gentiment, décrit François Anil. Avec les conséquences que ça a eu… ».
Fille de Fautais (son père a même été brièvement maire en 1977), Annette Anil achète une maison en 1981 sur le boulevard du Lay, soit juste derrière la digue qui protège ces habitations contre la rivière Lay, sujette à de brusques débordements durant les grandes marées. En 2003, désormais à la retraite, le couple s’installe définitivement à la Faute. Deux ans plus tard, ils apprennent le classement de la digue comme intéressant la sécurité publique. « De larges zones occupées par des habitations sont soumises à un risque d’inondation », écrit l’arrêté préfectoral.
Inquiète pour sa sécurité et celle de ses voisins, Annette Anil va alors se lancer dans une véritable croisade pour obtenir des informations sur cette digue. L’endroit est géré par l’obscure Association syndicale des marais de la Faute, dite association des Chauveau, qui refuse de lui donner accès à ses archives. « Le président a systématiquement refusé que je consulte ces documents », raconte t-elle. Or à l’époque, le syndicat est présidé par Philippe Babin, fils de la première adjointe de Marratier, aujourd’hui sur le banc des prévenus aux côté de sa mère pour homicides involontaires et mise en danger d’autrui. On lui reproche entre autre de ne pas avoir organisé la surveillance de la digue le soir de la tempête Xynthia. Submergée par les flots dans la nuit du 27 au 28 février 2010, la digue Est a ensuite empêché l’eau de refluer, bloquant les habitants dans 2m30 d’eau. 29 sont morts noyés.
Face au refus de Philippe Babin, Annette Anil se tourne vers la préfecture qui la laisse accéder aux archives. Dans ces nombreux papiers – qu’elle met un mois à éplucher ! – elle découvre le nom de son mari : il est – sans jamais en avoir été informé assure t-il – syndic depuis dix ans ! Un « syndic fantôme » constate le président du tribunal. Annette Anil pose sa candidature pour intégrer l’association. « J’étais le vilain petit canard qui rentrait dans la forteresse ». Méconnu à la Faute-sur-mer, le syndicat est pourtant constitué de tous les propriétaires de la ville. Il est chargé de l’entretien des digues. Ordonnée par la préfecture, l’entrée au syndicat de Mme Anil n’est visiblement pas du goût du maire de la Faute, René Marratier, qui se fend d’une lettre à la sous-préfète, en juillet 2007, pour la tancer de cette décision. « Le syndicat a toujours été géré par des personnes qui sont nées ou habitent à la Faute depuis plusieurs dizaines d’années », écrit l’édile qui reproche à Annette Anil de n’habiter la ville que « depuis quelques années », de vouloir « grignoter le fruit de l’intérieur ». « Il a suffit à cette personne de formuler quelques jérémiades, conclue t-il, pour qu’elle soit élue ».
Un magistrat assesseur : « Est-ce qu’il avait peur que vous découvriez quelque chose ? »
Mme Anil : « Je ne sais pas. Moi je voulais informer, lui ne voulait pas. »
Sauf que Mme Anil a, entre temps, eu connaissance d’un diagnostique réalisé en 2006 sur la digue Est. « La digue était dégradée, très abimée à plusieurs endroits, explique-t-elle. Mais quand je disais en réunion du syndicat qu’il fallait le dire, on me répondait ‘Ouh la la, vous allez effrayer toute la population’. Ca m’a semblé aberrant que le syndicat ne réunisse pas les habitants pour les informer, il s’agissait de la sécurité de tout le monde, mais comme il ne faut pas faire peur aux gens, on ne dit rien. » Ce diagnostic relève des sections à risques, notamment les lotissements des Doris et des Voiliers, ceux où la majorité des victimes ont trouvé la mort le 28 février 2010.
Décidée à ne pas garder ce qu’elle sait pour elle, Annette Anil écrit plusieurs articles dans un journal local, L’Echo fautais, distribué dans toutes les boites aux lettres – y compris celles des élus. Apprenant aussi que des plaquettes ont été éditées sur les dangers de la digue, elle se rend à la direction départementale de l’équipement (DDE) en récupérer un carton, qu’elle distribuera ensuite à ses voisins. « Plusieurs personnes ont dit pendant l’instruction que ces plaquettes leurs avaient sauvé la vie », l’informe le président. Toujours très droite, elle lui répond : « Si ça a servi à ça, c’est extraordinaire ».
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