Damien Saboundjian, gardien de la paix de 36 ans, qui avait abattu Amine
Bentounsi d’une balle dans le dos, comparaîtra en appel devant une cour
d’assises. Ainsi en a décidé, vendredi dernier, le parquet général de Paris qui
a relevé appel de l’acquittement du policier, prononcé il y a dix jours,
par la cour d’assises de la Seine-Saint-Denis. Une décision rarissime.
La feuille de motivation de ce verdict, que nous avons pu consulter, est pour le moins lapidaire… « La scène telle que décrite (par Damien Saboundjian – NDLR) justifie un tir de riposte. » La cour estime qu’Amine Bentounsi « avait le temps de se retourner pour fuir, alors que Damien Saboundjian avait débuté son tir de riposte de plusieurs coups consécutifs, tel que cela lui avait été enseigné lors de ses diverses formations, c’est ainsi que l’impact de la balle a pu se trouver dans le dos de la victime ».
Dans un procès très politique, en plein débat sur
l’opportunité d’assouplir la légitime défense pour les policiers confrontés à
la menace terroriste, le parquet général prend des pincettes pour expliquer sa
décision. « Sans
méconnaître les difficultés et les risques auxquels sont confrontées les
forces de police dans l’exercice de leur mission », explique la procureure générale, elle juge « nécessaire
de faire procéder à un second examen de la procédure par une cour d’assises
d’appel, les conditions légales de la légitime défense ne paraissant, en
l’espèce, pas démontrées ».
Le 21 avril
2012, entre les deux tours de la présidentielle, Damien Saboundjian avait
abattu Amine Bentounsi, un multirécidiviste en cavale et armé, d’une
balle dans le dos. Poursuivi pour «
violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner », le
gardien de la paix encourait une peine de vingt ans d’emprisonnement. Les cinq
jours de débats devant la cour d’assises de la Seine-Saint-Denis, du 11
au 15 janvier, avaient
révélé les incohérences de la version policière, les mensonges de ses collègues
pour le couvrir et les pressions policières pour que ce procès n’ait pas
lieu. Mais, à la surprise
générale, la cour d’assises avait prononcé son acquittement, estimant qu’il
avait agi en état de légitime défense et n’était donc pas responsable
pénalement.
La feuille de motivation de ce verdict, que nous avons pu consulter, est pour le moins lapidaire… « La scène telle que décrite (par Damien Saboundjian – NDLR) justifie un tir de riposte. » La cour estime qu’Amine Bentounsi « avait le temps de se retourner pour fuir, alors que Damien Saboundjian avait débuté son tir de riposte de plusieurs coups consécutifs, tel que cela lui avait été enseigné lors de ses diverses formations, c’est ainsi que l’impact de la balle a pu se trouver dans le dos de la victime ».
L’avocat général avait pourtant jugé improbable cette
version des faits défendue à l’audience par l’accusé, rappelant qu’aucun témoin
ne venait la confirmer. Or, dans le cas de la légitime défense, le doute n’est
pas censé bénéficier à l’accusé qui supporte, au contraire, la charge de la
preuve. L’avocat général avait requis cinq ans de prison avec sursis assortis
d’une interdiction d’exercer à vie et avait exhorté les jurés à ne pas délivrer
un « permis de tuer ».
Quelques heures plus tard, l’annonce de l’acquittement était accueillie dans
les cris et les larmes par la famille de la victime, soutenue par des
militants de plusieurs collectifs.
L’appel du parquet général est donc un « soulagement » pour les parties
civiles, explique leur avocat, Me Michel Konitz. « C’était une très
mauvaise décision, poursuit-il. Si on regarde le dossier, c’est insensé qu’il ait été acquitté. » Quant
à l’avocat de la défense, Me Daniel Merchat, il évoque un « acharnement » : « Je suis étonné que le
parquet général critique ainsi une décision rendue par un jury populaire
et surpris qu’il se mette à la remorque de quelques groupuscules spécialisés
dans la contestation des institutions de la République. »
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