mardi 29 mars 2016

Les pirates du Tribal-Kat devant la justice


@Julien Jaulin
Deux mondes se sont fait face cet après-midi devant la Cour d'assises de Paris. Dans le box des accusés, sept Somaliens, accusés d'avoir, en septembre 2011, tué Christian Colombo, skipper du catamaran le Tribal-Kat. Âgés de 26 à 33 ans, habillés en survêtements pour la plupart, le crâne rasé, ils risquent une peine d'emprisonnement à perpétuité. En détention provisoire depuis quatre ans et demi, ils ont obtenu le statut d'indigence carcérale : 20 euros par mois.

Avec l'aide de deux interprètes, ils répondent aux questions du président qui leur demande d'égrener leurs noms, adresses et professions avant leur détention. Ils étaient chauffeur de taxi, « pêcheur, à l'époque où il y avait des poissons en mer » - la surpêche est accusé d'avoir épuisé les eaux au larges de la Somalie -, mécanicien, collecteur d'encens...

@Julien Jaulin
Face à eux, un bloc de douleur. Ils sont cinq à se serrer sur le banc des parties civiles. Au centre Évelyne, la veuve de Christian Colombo, élégante femme de 58 ans aux cheveux gris coupés courts, en chemisier blanc et pantalon noir. Deux ans avant d'être attaqué, le couple varois avait tout vendu pour faire le tour du monde. Pendant que le président de la Cour d'assises rappelle les faits, les proches d’Évelyne lui tiennent longuement la main.

Le 8 septembre 2011, à 13h17, un appel de détresse est lancé depuis le Tribal-Kat. Quelques heures plus tard, une frégate allemande trouve le catamaran de 16 mètres sans personne à son bord, mais des impacts de balles sont visibles et une marre de sang, dans laquelle baignent les lunettes de Christian Colombo. Évelyne Colombo racontera plus tardn : khcgfdfwsq<dser aux enquêteurs que le corps de son mari a été jeté à la mer. Il ne sera jamais retrouvé.

Elle passera 48 heures cachée sous une bâche dans le bateau des pirates, trempée par les vagues. Le 10 septembre, un navire de guerre espagnol détecte un « skiff », une embarcation légère, mais lorsqu'ils approchent, les hommes à bord exhibent Évelyne Colombo, une kalachnikov pointée sur sa tempe, les militaires font marche arrière. L'assaut sera finalement donné quelques heures plus tard. Deux pirates seront tués, les autres arrêtés.

@Julien Jaulin
Durant les interrogatoires, les accusés ont chargés les deux pirates tués lors de l'assaut : le chef et son adjoint les auraient recrutés pour 100 euros (une fortune en Somalie) sans leur expliquer le but de cette mission. Pour Me Martin Reynaud, l'un de leurs avocats, ce procès ne pourra se faire sans comprendre la situation d'extrême pauvreté de la Somalie, où l'espérance de vie ne dépasse pas les 55 ans. «  La guerre, la faim : pour qu'ils soient bien jugés, il faudra que la cour comprenne de quel enfer ils viennent. » Paul Moreira, auteur d'un documentaire sur la Somalie, sera d'ailleurs entendu durant le procès, prévu pour durer jusqu'au 15 avril. Une autre de leurs avocate, Me Elise Arfi, regrettait avant l'ouverture des débats : « Quelle que soit l'issue de ce procès, la justice ne saura pas quoi faire de ces hommes ».

Croquis d'audience : Julien Jaulin

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