jeudi 28 septembre 2017

« Antonin Bernanos doit être relaxé »

Il n’a pas, dit-il, « l’éloquence » de ses confrères. Me Antoine Vey vient de citer Georges Bernanos (« Que voulez-vous ? La liberté est partout en péril et je l’aime. Je me demande parfois si je ne suis pas l’un des derniers à l’aimer, à l’aimer au point qu’elle ne me paraît pas seulement indispensable pour moi, car la liberté d’autrui m’est aussi nécessaire ») et lorsqu’il se lève pour plaider, Arié Alimi, dernier des neuf avocats de la défense, s’excuse presque de l’exercice qu’il va imposer au tribunal. Sans effet de manche, ni rhétorique grandiloquente, l’avocat ausculte les fais, les dissèque avec un seul objectif : prouver l’innocence de son client, Antonin Bernanos.

Cette affaire, rappelle Me Alimi, « commence par un signalement de la DRPP », la direction des renseignements de la préfecture de police. Or, « Antonin Bernanos a une longue histoire avec la DRPP » : onze poursuites sur la base de ces mêmes renseignements, « tous erronés », ayant débouché sur des relaxes ou des classements sans suite. L’étudiant en sociologie porte à son casier une condamnation pour une bagarre « avec les nazillons d’Assas », « ceux qui m’ont dit, quand je suis arrivé à Assas, que je devais apprendre à courir ». Car, « oui Antonin est un antifasciste », rappelle l’avocat qui étrille, au passage le procureur : « Ne pas faire la distinction entre un anarchiste et un antifasciste c’est méconnaître la politique française aujourd’hui et l’histoire en général. »

Et voici que surgit l’homme qui a été au cœur de ces trois jours d’audience. Le témoin sous X « numéro T142 » dont l’identité de policier infiltré a été dévoilée par erreur. C’est lui qui, juste après l’incendie de la voiture de police brûlée quai de Valmy ce 18 mai 2016, désigne quatre jeunes garçons comme ayant participé à l’agression. Poursuivis pour tentative d’assassinat, trois sont aujourd’hui jugés pour avoir participé à un groupement en vue de commettre des violences  et Antonin Bernanos pour violences volontaires. « Qu’a fait le policier témoin anonyme ? lance Arié Alimi au tribunal. Il a systématiquement refusé de témoigner. C’est une infraction pénale. Si vous utilisez ce témoignage, vous corroborez une infraction pénale. » Pour l’avocat, « les contradictions du témoin anonyme sont tellement énormes, qu’il doit être considéré comme un faux témoignage. Le ministère public aurait dû le poursuivre ».
Reste le « faisceau de preuves » brandi par l’accusation pour désigner Antonin Bernanos comme l’agresseur. Le « caleçon rose » ? Antonin Bernanos ne le portait pas pendant la manifestation. Les baskets noires Nike ? Il y en avait des dizaines chez les manifestants. Les deux bagues portées aux majeurs ? « Il y a 13 profils d’hommes avec deux bagues dans cette manifestation » lance l’avocat, photos à l’appui. Une preuve, en revanche, disculpe Antonin Bernanos, selon Me Alimi : sa veste noir. Le k-way de l’agresseur n’a jamais été retrouvé chez le jeune homme. « Dans cette affaire, on a voulu accuser un homme, conclut Arié Alimi. Pourquoi ? Je ne peux pas répondre, je ne suis pas un politique. Comment en arrive-t-on à contaminer nos enceintes judiciaires avec de la politique ? A vouloir accuser un opposant politique ? Ici en France, pas en Russie. Antonin doit être relaxé. Il est devant vous pour quelque chose qui n’a rien à voir avec le droit. » Le jugement a été mis en délibéré au 11 octobre.

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