Il est maladroit René
Marratier. Dans sa bouche, les mots se bousculent, les expressions se
mélangent. En costume bleu marine, l’ancien maire de la Faute-sur-mer de 1989 à
2014 était entendu hier par le tribunal des Sables d’Olonne (Vendée), où il
comparait depuis trois semaines pour homicides involontaires aggravés et mise
en danger d’autrui.
« La tempête Xynthia m’a fragilisé jusqu’au plus profond de moi-même, commence le garagiste retraité de 62 ans. Cette douleur ne m’a jamais quittée, j’y pense jour et nuit. » Dans la nuit du 27 au 28 février 2010, la digue de la petite station balnéaire dont il était le maire fut submergée par les flots. 29 hommes, femmes et enfants moururent noyés. « A mon humble niveau, j’ai tout fait pour sécuriser la population », répète en boucle l’ancien édile, qui reconnait du bout des lèvres qu’il aurait peut être pu faire mieux : « La culture du risque n’était pas présente en moi, c’est de ma faute ».
« Jamais je
n’aurais pu penser qu’une telle catastrophe puisse arriver, se défend René
Marratier. Comment voulez-vous que je sache que la lune et le soleil vont
s’associer pour créer une montée des eaux d’un mètre cinquante, même les
pompiers et la préfecture ne l’avaient pas prévu ! Alors un petit maire
comme moi, qui n’a pas l’intelligence en la matière… ». Mais ce
système de défense est rapidement mis à mal par les questions du président du
tribunal. « On ne vous reproche pas de ne pas avoir su regarder dans des
boules de cristal », le tance Pascal Almy, qui détaille toutes les alertes
envoyés au maire depuis 1995 : plus d’une quarantaine au total, pour le
prévenir que la Faute-sur-mer « n’était pas une commune comme les
autres », puisque soumise à un risque majeur d’inondation et de submersion
marine.
Plusieurs études faisaient
état en particulier de la nécessité de rehausser la digue censée protéger les
habitations qui se retrouveront inonder après le passage de la tempête
Xynthia. « Qu’est ce que l’Etat aurait pu faire de plus pour vous sensibiliser ? »
lui demande le président. « Apporter son aide, répond l’ancien maire. Nous
dire ‘Monsieur le maire, on en a marre, votre commune est en danger, on arrête
de jouer’ ». Broncha sur le banc des parties civiles.
L’interrogatoire de René
Marratier doit durer jusqu’à demain. Il encourt cinq ans d’emprisonnement et
750 000 euros d’amende.
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